Faits divers – Une hypothèse en 26 lettres, 5 équations et aucune réponse

Le MAC VAL présente sa prochaine exposition, labellisée d’intérêt national, du 15 novembre 2024 au 14 avril 2025.

Parce que le fait divers est souvent lié à l’univers de l’enquête, à une certaine forme d’énigme et à la volonté des artistes d’élucider leur part mystérieuse, l’exposition s’articule autour de la poésie des équations à plusieurs inconnues qui sont pensées entre paramètre et registre « d’indicialité ». Chacune des équation sera introduite par « des pièces à conviction » confortant la métaphore bien légitime de l’enquête et du judiciaire et laissant planer l’empreinte de l’erreur judiciaire ou de l’erreur humaine à l’origine de nombreux faits divers. C’est autant un univers de formes qui sera proposé qu’un vaste champ lexical que s’emploiera à échafauder la présente exposition. L’abécédaire typologique, non sans faire référence au Dictionnaire amoureux du faits divers (Didier Decoin, Éditions Plon, 2022) entendra ainsi montrer la diversité des artistes et des formes qui se sont intéressés de près à ces évènements singuliers entre indices indicibles et indécidables. Il visera également à mettre en lumière l’impact de la culture visuelle du fait divers sur l’art contemporain. L’exposition présentera une hypothèse de ce qu’est le fait divers mais se gardera bien d’imposer une réponse, elle laissera ainsi libre cours à la possibilité, pour toutes et tous, de se faire son avis, d’être aussi saisis d’un doute ou tout simplement de se laisser porter par les délices de l’affabulation ou de la spéculation.

Cinq équations structurent l’exposition

En sciences mathématiques, elles sont des variables et correspondent, assez bien, à l’univers des énigmes à résoudre. Elles résument la volonté des artistes à souvent vouloir élucider l’énigme qui, parfois ou souvent, sous-tend un fait-divers et transforment les salles d’exposition temporaire du musée en un vaste jeu de plateau en référence au jeu de société célèbre. Chaque équation réunit 5 ou 6 lettres de l’abécédaire. Elles rompent avec l’ordre alphabétique afin que visiteuses et visiteurs puissent appréhender le champ lexical fait-diversier, les principales thématiques, la diversité des réponses proposées par les artistes ou les enjeux de réception. Respectivement, les équations décrivent des grandes catégories ou des archétypes : l’univers judiciaire (équation no1), la catastrophe (équation no2), la violence (équation no3), l’humeur noire (équation no4), la pulsion scopique (équation no5).

26 hypothèses alphabétiques

Au-delà du caractère illustratif de l’abécédaire, le fait divers est également une excellente façon, ainsi que Vincent La voie, co-commissaire de l’exposition, a pu le rappeler, de questionner certains protocoles et modes opératoires de l’art contemporain. La « fictionnalisation » de l’événement dit mineur, la prégnance du modèle indiciaire, la transposition artistique de protocoles d’enquête : reconstitution, inventaire et collecte, le jeu des temporalités dans les représentations événementielles, l’éthique du témoignage et des discours probatoires, le sensationnalisme et les régimes des affects ou enfin les effets d’authenticité et débats d’opinion seront autant de points évoqués dans chacune des cinq équations qui structurent l’exposition. Malgré un engouement certain, aucune exposition en France jusqu’à aujourd’hui n’a réellement été consacrée à une analyse artistique du fait divers. Puissant catalyseur d’affects (compassion, plaisir, curiosité, identification), le fait divers a une valeur fantasmatique qui participe de la dramaturgie et de l’art contemporain.

Nicolas Surlapierre

Directeur du MAC VAL,

commissaire de l’exposition